Yazid Amghar est, depuis le 12 novembre dernier, champion de France de Boxe anglaise catégorie super-légers. Il a détrôné le tenant du titre, Renald Garrido. En parallèle de la préparation De ce combat, il préparait l’ouverture de sa propre salle de boxe : Le Hall Boxing.

La salle a ouvert le 6 Janvier, et Yazid met autant d’énergie à partager sa passion avec ses élèves, qu’à se préparer à remettre en jeu son titre de Champion de France. Mais on ne se fait pas de soucis pour lui. Celui dont le nom de famille signifie Le Grand en amazighe marocain a sans doute été touché par la grâce : sur 15 combats, il n’a jamais connu aucune défaite ! Nous l’avons rencontré courant décembre, quelques semaines avant l’ouverture de sa salle…

Enfant, vous étiez inscrit à plein de cours de sport, pourquoi avez-vous finalement choisi la boxe ?

boxeJ’étais inscrit dans le gymnase Jesse Owens à Bobigny et ils proposaient trois activités : le ping-pong au sous sol, le volley-ball au rez-de-chaussée et la boxe au premier étage. J’ai fait chaque étage !  Quand j’étais jeune, j’avais beaucoup d’énergie, je ne savais pas trop comment la dépenser, et un jour mon frère m’a conseillé d’aller voir la salle de boxe. Le prof m’a proposé de m’installer et d’observer le cours. Le lendemain, j’y suis allé pour faire mon premier cours. Et puis, avec les Rocky et Mike Tyson, j’avais toujours eu un peu envie de faire de la boxe, mais j’avais, comme tout le monde, un peu d’appréhension. 

A quel moment avez-vous décider de passer en professionnel ? Etait-ce un choix difficile ?

Les choses se sont faites naturellement. J’ai commencé à 12 ans la boxe française, même si à la base je voulais faire de la boxe anglaise, mais la salle la plus proche de chez moi proposait uniquement de la boxe française. J’ai quand-même bien aimé, j’ai été champion de France Cadet, Minime, Junior et Senior. Mais un moment, j’avais besoin de changer d’ambition et de discipline, donc je suis passé à la boxe anglaise. J’ai fait le tournoi amateur Les Ceintures Montana, que j’ai remporté. Après j’avais deux choix : soit poursuivre ma carrière de boxe anglaise en amateur en espérant faire les Jeux Olympiques, soit devenir boxeur professionnel. Ce sont deux carrières très différentes.

Mais j’ai fait mon choix au moment où le boxeur Alexis Vastine participait aux JO. A deux reprises, il s’est fait voler en quelques sortes sa victoire. Il avait gagné ses combats, mais les juges ne lui ont pas donné ses victoires. Dans les JO, il y a pas mal de politique… En voyant ça, ça m’a un peu dégouté, j’ai préféré passer professionnel et vivre ma carrière au mieux. En plus, les JO, c’est tous les 4 ans, donc il suffit de se blesser la veille du combat pour ne pas participer et avoir la sensation d’avoir perdu 4 ans de préparation. On a un peu une épée de Damoclès au dessus de la tête quand on prépare les JO.

La boxe est un sport violent, mais vous dites qu’elle vous a appris le respect, c’est paradoxal…

Quand on commence la boxe, on n’a pas la notion de la violence, car au début, on n’a pas le droit d’appuyer les coups, on est plutôt sur des cours éducatifs, de l’assaut. On apprend à maitriser nos mouvements. C’est plus un jeu. On doit toucher, sans se faire toucher, mais il y a des règles : on doit respecter l’arbitre quand il nous donne des recommandations, on doit respecter notre adversaire car on ne doit pas le toucher à certains endroits, et on doit le saluer. On apprend aussi à perdre et à gagner. Donc au début, il n’y a pas trop d’appréhension physique, c’est que de la touche.

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Quand on devient majeur et qu’on passe sur des oppositions avec de la puissance, on fait des vrais combats. Mais j’ai mis longtemps à voir l’impact des coups, et là, avec l’âge, même si je n’ai que 27 ans, je prends de plus en plus conscience des coups qu’on prend et des microtraumatismes que l’on peut garder. C’est un sport magnifique, qui nous apprend pleins de valeurs, c’est une discipline et un art hors du commun. Mais la finalité reste d’avoir l’intégrité physique de l’adversaire.

Quelles sont les qualités d’un bon boxeur ?

La base, c’est le mental. Sur un premier cours d’une personne que je ne connaît pas, en lui proposant un exercice dur, en fonction de la manière dont elle va réagir face à l’exercice, je peux voir déjà si elle a des capacités pour pouvoir poursuivre un entrainement constructif. Il ne faut pas qu’elle lâche. C’est cette rage, ce dépassement de soi de façon naturelle qui constitue la qualité première d’un bon boxeur.

Après, la technique, ça s’apprend. Le mental, on peut progresser, mais quand tu l’as, tu l’as ! Il faut aimer repousser ses limites, et être dans le rouge. C’est un sport où on aime bien être dans la difficulté et dans le dépassement de soi. Donc effectivement, le plus important, c’est le mental.

Vous êtes à ce jour invaincu, comment-est ce possible ? Vous ne baissez jamais les armes ?

J’ai pris chaque combat au sérieux. J’ai beaucoup de chance d’avoir un palmarès sans défaite, c’est un challenge hyper intéressant pour moi. Je vais essayer de faire en sorte de le rester. Je me prépare, j’essaie de tout donner pour être à la hauteur le jour J.

Vous n’étiez pas le favori pour les championnats de France, comment vous êtes vous préparé pour battre votre concurrent Renald Garrido ?

J’ai eu une préparation assez particulière parce que j’ai appris que j’étais challenger officiel au titre national en même temps que j’ai récupéré le local où j’ai ouvert ma salle de boxe. Donc j’ai eu un emploi du temps très chargé. Mais c’est le mental qui m’a permis de continuer le chantier, et d’avoir le courage, après une journée de travaux dans la salle, de partir à l’entrainement. C’est ça le vrai combat ! Ce n’est pas de monter sur le ring le jour J, c’est de mentalement trouver les ressources nécessaires pour prendre ton sac après une journée de travail et d’aller t’entraîner.

boxeJ’ai essayé de m’entrainer du mieux que je pouvais et à fond. Je savais que je prenais un risque, parce que je n’allais pas être à 100% le jour J. D’ailleurs le combat était serré, heureusement j’ai réussi à faire la différence grâce au mental. C’était un challenge à relever. Quand on est sportif de haut niveau, on doit se fixer des objectifs, et moi je voulais essayer d’ouvrir ma salle et de remporter ce titre parallèlement. On m’a souvent dit qu’un sportif de haut niveau ne doit que faire sa spécialité, et rien d’autre. Mais moi, j’ai toujours réfléchi à ce que je pourrais faire plus tard, à la fin de ma carrière. Même pour mes parents, il fallait que je trouve un équilibre de vie. Donc j’ai toujours travaillé en parallèle de ma carrière. Car il faut savoir qu’on ne vit pas de la boxe.

Donc j’avais le choix entre le lancement de ma salle de boxe après ma carrière de sportif ou pendant. Mais j’ai toujours aimé prendre des risques, et j’ai trouvé ça excitant de faire pendant car ça pouvait créer une bonne dynamique. 

Vous allez ouvrir une salle de sport. Vous allez donner des cours ? Avez-vous une méthode particulière ?  Qu’allez vous enseigner ? Que la technique ?

On va essayer de faire bénéficier les élèves de tout ce que peut apporter la boxe en termes de valeurs, de ressenti, en leur apprenant à éviter les coups. On leur apprend la boxe à travers des mouvements qui se rapprochent de la réalité et qui sont inspirés de mes entrainements à moi. Je fais bénéficier à mes élèves de mes entrainements, mais sans qu’ils se prennent des coups au visage. On travaille avec des cibles. Ainsi, la boxe devient accessible. Ils bénéficient d’un cours où on n’est pas plus de 8, et on apprend techniquement à vivre des sensations de boxeur. A travers l’entrainement physique, les circuits training, les cross training, ils apprennent le dépassement de soi. Pour la technique, il y a des mises en situations. Mais pour ceux qui veulent rentrer plus profondément dans ce que propose la boxe, et le fait de se prendre des coups, on propose aussi des activités de fight-boxing, mais seulement avec mon accord, c’est toujours contrôlé et dans un bon état d’esprit. 

C’est quoi la différence entre la boxe anglaise et la boxe française ?

La boxe anglaise, on utilise que les poings, au niveau du visage et du corps. C’est la boxe de Mohamed Ali, Mike Tyson et bien d’autres champions. La boxe française, on utilise les poings et les pieds.

C’est quoi l’objectif maintenant ? Quels sont vos prochains projets ?

L’objectif, ça va être de défendre ma ceinture de champion de France, de confirmer mon titre et d’acquérir de l’expérience. Je pense que je vais faire deux ou trois défenses de titre à partir de février, pour vraiment gagner en maturité. Parce que ça ne fait que 3 ans et demi que j’ai basculé de la boxe française à la boxe anglaise, donc du coup je dois encore travailler beaucoup de choses et gagner en expérience pour ensuite avoir une opportunité européenne. Le tout en continuant à gérer mes équipes et ma salle.

Si vous souhaitez vous initier à la boxe, vous ne pouvez pas rêver mieux comme professeur que Yazid ! Sa salle : Le Hall Boxing.

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